Publié par : Thierry | 10 février 2009

Recrutement par substitution…


Relais d’un point devue circulant par mail, allusion à l’idéologie profonde qui se cache derrière les choix actuels en terme d’éducation :

« Objet: Recrutement par substitution

Chers collègues

Derrière la réforme des concours de l’enseignement (la masterisation) surgit, comme vous le savez, un problème extrêmement grave, qui lui est intimement lié, et que nous ne faisons qu’effleurer en considérant la situation des « reçus-collés » : toutes les « réformes » en cours visent de fait la disparition des titulaires bien formés, à tous les étages, de la maternelle à l’université.

Vous trouverez confirmation de cette politique parfaitement assumée, sur le site du rectorat de Versailles, site qui avoue ouvertement recruter « toute l’année » des « enseignants non titulaires » dans toutes nos disciplines, au moment même où le nombre de postes au concours fond dramatiquement, et où l’on supprime des postes de titulaires, au prétexte qu’il y aurait trop d’enseignants en France (13500 cette année, etc.): http://www.ac-versailles.fr/rh/nontitulaires.htm

Divers collègues de Nanterre ont été contactés le mois dernier par les « ressources humaines » du rectorat pour inciter leurs étudiants « bac + 3 » à postuler, « en urgence ». Je viens d’apprendre que la même chose a eu lieu dans l’Académie d’Orléans. Oseront-ils bientôt nous proposer des « primes » pour cela aussi, afin de nous faire passer du statut de juré de concours à celui de sergent recruteur ?

– Pour devenir prof de collège, aujourd’hui, il suffit donc d’être « étudiant bac +3 ». Il est simplement demandé d’avoir un casier judiciaire vierge. Il y a plus de postes que de candidats.
– Le salaire est de 34,5 euros bruts par heure de cours effective devant les élèves (soit environ 8 euros bruts de l’heure « réelle », si l’on considère que l’étudiant-enseignant doit quand même préparer son cours, corriger ses copies, recevoir les parents, etc.). A charge pour les collègues, bénévolement et en plus de leurs charges toujours accrues, de l’encadrer comme ils pourront. Mais prof, au fond, est-ce vraiment un métier ?…

Il s’agit donc bien de remplacer des enseignants formés, par des « étudiants-enseignants » appelés à faire un petit boulot pour payer leurs études. Quid de l’engagement, du professionnalisme, de l’expérience, de l’investissement personnel, etc. ?

En affaiblissant ainsi le service public sous couvert de « bonne gestion », en mettant devant des élèves des enseignants de plus en plus nombreux sans formation, sans motivation, et sans avenir, le gouvernement a l’ambition de favoriser une migration encore plus rapide des élèves vers les établissements privés. Parallèlement, l’Etat pourra se désengager d’écoles de plus en plus « autonomes », dans lesquelles il n’y aura de toute façon que des enfants de pauvres – autant dire personne. Il sera bientôt possible de laisser pourrir, encore plus (si la chose est possible), les écoles ghettos, tandis que prospèreront les officines privées et autres institutions respectables – mais payantes…

Avec un salaire d’enseignant titulaire en fin de carrière, on peut recruter deux gardiens de prison : opération blanche.

L’opinion doit être informée du carnage qui est en marche. Rapidement.

Cordialement
François Regourd, Université Paris Ouest Nanterre  »

Pour accompagner ces propos et l’idée de démontage de l’éducation nationale afin de la remplacer par un modèle plus libéral, au mot d’ordre de rentabilité :
– suppression des postes d’enseignants mis à disposition dans les associations éducatives complémentaires (CEMEA, FRANCA, Pupilles de l’Enseignement public, certainement trop ancrées dans les réalités populaires…) et réduction de leurs subventions de fonctionnement
– suppression massives des postes d’enseignants mis à dispositions auprès des rectorats sur des missions (certainement inutiles…) comme les Arts et la Culture, les Technologies de l’Information et de la Communication… etc… alors que les promesses de développement continuent, elles à pleuvoir… et pour les confier à qui ? Aux Inspecteurs Pédagogiques Régionaux, déjà surchargés de travail, et qui ne peuvent plus exercer leur métier de base (depuis longtemps…) : conseiller, inspecter !
– suppression des postes d’enseignants détachés dans le réseau CNDPCRDP (Centre Régionaux et Nationaux de Documentation Pédagogique sous tutelle du ministère de l’EN), diminution de leurs subventions de fonctionnement et augmentations de leurs charges… Vous avez dit volonté d’étranglement ?
– fermeture programmée du Centre Nationale d’Enseignement à Distance (CNED), remplacé par une 31 eme académie virtuelle sur Internet… suppression des postes d’enseignants détachés…
– regroupement et/ou fermeture des centres régionaux ONISEP (Office national d’information sur les enseignements et les professions) et réduction des effectifs associés…
– absorption des IUFM par l’université, et suppression des stages de formation professionnel dans les classes…
– suppression de l’accueil des enfants de moins de 2 ans dans les maternelles, afin de créer des « jardins d’éveil » payants, et à la charge des collectivités (vous savez celles à qui ont promet moins de subsides liés à la taxe professionnelle..)
– suppression des EMALA (équipe mobile d’animation et de liaison académique) et des postes d’enseignants affiliés sur ces postes à profil. Ces moyens mobiles, type Technobus, Gymnobus, Scientibus, Artobus, permettent de mutualiser des moyens et infrastructures sur des écoles rurales isolées afin que ces dernières puissent bénéficier des mêmes chances que leurs copains des villes : agrès en gym installés provisoirement dans les salles communales, outils et maquettes scientifiques… etc
– suppression à terme des RASED et des postes d’enseignants spécialisés à l’heure ou la priorité est donnée au soutien scolaire… ?
Bref, que ceux qui ne voient pas dans tous ces choix, un nouveau modèle d’éducation, rentable, et formaté au ordres d’une idéologie continuent de dormir tranquille…


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